« Si, j’aimerais beaucoup faire un shooting photo avec toi. »

Ce serait joindre l’utile à l’agréable, travailler tout en admirant l’autre dans de jolies tenues, et avec plein de photos souvenirs à conserver en plus. Oui, définitivement, si c’était possible, il sauterait sur l’occasion. Il répondit ensuite à son cadet.

« C’est pas un manque de confiance, c’est juste que je bosse avec des célébrités presque tout le temps, et ces gens ne sont pas comme moi. Ils sont… » Il réfléchit un instant. « Bah, grands, déjà, c’est important pour être mannequin, et puis ils dégagent quelque chose. Comme toi en fait, t’as un truc qui m’a attiré dès la première fois que je t’ai vu… » Il s’arrêta un instant, pensif. « Quand tu me regardes, j’ai aussi l’impression d’être spécial, mais non… Je suis juste… un coréen ordinaire. »

Un coréen ordinaire qui avait juste eu un peu de chance, c’était comme ça qu’il se voyait. Arrivé sur le tard dans l’industrie musicale, et sans cesse entouré de gens qui avaient baignés dans ce milieu toute leur vie ou presque, il n’avait pas du tout la sensation de sortir du lot, même s’il était loin de se trouver moche ou quoi que ce soit.

« Ma future chemise alors. » Fit-il avec un air malicieux.

Après avoir envoyé fait valser Ren et le tableau, Sarang offrit à son amant un moment de tendresse pas toujours très sage. Moment qui se prolongea sous les draps alors que le serveur s’occupait de leur petit-déjeuner, mais auquel il finit par mettre fin. Soucieux de l’autre et du fait qu’il devait avaler quelque chose de consistant. Avant ça, Sarang répara sa bêtise en ramassant le cadre pour le raccrocher un peu de travers sur le mur. Quand il vint s’asseoir à table, Ren engloutissait ses pancakes avec un appétit qu’il ne lui avait encore jamais vu.

« Vas-y mollo Adonis, tu vas t’étouffer. »

Adonis, oui, certains se rappelleront peut-être que Sarang avait dit qu’il trouverait un surnom pour Ren un jour. Ça avait pris le temps, mais il avait eu l’envie de tester celui-là. L’air de rien, il avala le morceau de pancake avec un air amusé. Il était en train de se servir du thé, un autre morceau de pancake à la bouche, quand le mannequin lui fit une nouvelle proposition.

« Un bal de charité ? »

Clairement, ça l’emballait beaucoup moins que d’aller voir les glycines ou de faire des séances photo. Il n’avait pas de très bons souvenirs des précédentes fois où il avait participé à ce genre de soirées. Peut-être que le fait de porter des masques rendra les choses plus faciles, allez savoir.

« D’accord, je veux bien venir. »

Au pire, il pourra toujours s’enfuir en courant, la dernière fois ça s’était plutôt bien terminé. Ce n’était cependant pas le but, il avait les deux pieds dans ce milieu de luxe et de paraître, à présent, qu’il le veuille ou non. Il était temps de s’y faire, de montrer à Ren et à lui-même qu’il pouvait gérer ce genre d’évènements. De toute manière, ça allait forcément être plus facile, puisque son compagnon serait à ses côtés cette fois. Il n’allait pas faire la tronche en le voyant arriver, ou s’il le faisait, Sarang allait le mordre.

Leur petit déjeuner avalé, Ren s’habilla, cette fois avec une chemise blanche, il décida donc de faire contrepied en se mettant tout en noir. Un bref passage par la salle de bain pour faire un brin de toilette, et le voilà qui était prêt. Restait à savoir à quoi.

« Tu as envie de faire quelque chose ? Sinon on peut aller jouer, même pas besoin de quitter l’hôtel pour ça. » Sarang contourna le lit pour fureter dans les brochures qu’il avait regardées la veille. Il en tira une et l’ouvrit. « Y’a une salle de sport, piscine sauna tout ça. Y’a aussi des billards, des tables de ping-pong et des simulateurs de golf ! »

C’était surtout le simulateur de golf qui l’intriguait, bien qu’il n’avait jamais fait que du mini-golf, il se demandait comment ça marchait. Quelques minutes plus tard, le voilà qui traînait donc Ren dans la pièce qui abritait tous les jeux décrits dans la brochure. Dans l’espace consacré au golf, des terrains virtuels étaient projetés sur un mur. Sarang avait imaginé qu’il fallait mimer le geste pour jouer, mais pas du tout. Il fallait tirer une vraie balle contre le vrai mur.

« Trop bizarre. » Fit-il en tripatouillant les options sur un écran tactile.

Finalement, il se prit une canne et fit un essai. La vraie balle cogna donc le mur avant de rouler dans un trou prévu pour, un peu comme au bowling, mais sur l’écran, la balle virtuelle s’était bel et bien envolée dans les airs, dépassant de très loin le drapeau et le trou.

« Trop bien ! Même en virtuel, ils ont prévu qu’on puisse envoyer sa balle dans une mare ! »

Sarang était nul, mais clairement impressionné par toute cette technologie qui permettait, pour quelque million de wons, de jouer à un jeu qui nécessitait en réalité juste une balle et un peu d’herbe.

Sarang hocha la tête en écoutant Ren donner quelques détails sur le métier de mannequin, et surtout faire la distinction entre mannequin et modèle photo. Il réalisa que sa vision des choses était moins ouverte et plus clichée que la réalité. Bien sûr, la remarque de son compagnon sur son sourire le fit immédiatement sourire, et rougir un peu aussi. Ren pouvait vraiment dire des choses adorables. Une fois habillés tous les deux, son cadet lui parla des masques qu’ils allaient devoir s’acheter. Pour lui, la réponse coulait de source.

« On va faire ça séparément ! »

Éternel enfant, Sarang ne pouvait résister à ce genre de petit jeu, et puis ça pimenterait un peu cette soirée qu’il imaginait être d’un ennui mortel si l’on omettait le côté bal masqué. C’était bien un truc de riches, les galas de charité. On donne un peu d’argent, on danse et c’est bon, on a fait sa bonne action, et surtout, tout le monde autour nous a vus la faire. Enfin bref, un peu plus loin, dans un autre étage de l’hôtel, Sarang s’essaya au golf sous le regard quelque peu moqueur de Ren. Après quelques remarques, voilà que son cadet venait se glisser dans son  dos pour lui montrer la bonne posture. Non, non, personne n’est dupe sur ce coup-là.

« Comme ça ? »

Prenant sa meilleure tête de garçon studieux, Sarang encarta les jambes, se pencha légèrement en avant et cala bien comme il faut ses hanches contre celles de Ren. Déconcentré par le baiser et les provocations du mannequin, il ne vit même pas ce qu’il advint de la balle. Autant dire qu’il n’avait rien appris du tout. Il eut une petite moue lorsque Ren l’abandonna pour aller papillonner du côté des billards, mais se reprit vite, ne voulant pas trop montrer à quel point son camarade pouvait jouer avec lui comme il l’entendait. Mais visiblement Ren n’en avait pas fini.

« S’envoyer en l’air, hein ? Je t’ai connu plus subtil, tu sais. »

Il l’avait connu plus direct aussi, cela dit. Sans doute y avait-il quelque chose à interpréter là-dedans. Ce que Sarang voyait, en tout cas, c’était que faire la transition entre une relation purement physique et quelque chose de plus sentimental n’était pas si évident. Il avait envie de lui, sincèrement et profondément, mais il avait aussi envie d’autre chose, et clairement, il allait falloir un peu de temps pour équilibrer les choses. Surtout si Ren décidait de poursuivre ses taquineries.

« Essayer du Saint-Laurent ? C’est un peu tes vêtements que je vais porter du coup ? Trop bien ! » Répondit-il entre deux tirs.

Le golf finit par le lasser, et il alla passer quelques minutes au billard, où les résultats furent un peu mieux. Quand il se lassa de ça également, il vint s’asseoir à côté de Ren pour regarder son dessin. Pendant deux minutes.

« Ça va être long, deux heures. »

Rah, il n’aimait pas attendre. Deux heures, c’était trop court pour faire quoi que ce soit d’un peu recherché, et trop long pour ne pas s’ennuyer. Sarang croisa les bras, le regard sombre, les doigts agités, puis il sauta presque de son fauteuil et tapota l’épaule de Ren.

« La salle de sport ! T’as qu’à y aller, je vais me changer. »

Peu de temps après, Sarang débarquait dans la salle de sport avec un t-shirt trop grand – parce qu’à force de voler les affaires de Ren il s’était gouré en faisant sa valise – un vieux short délavé – son préféré – une serviette et de bonnes chaussures. Après s’être échauffé, il jeta son dévolu sur les tapis de course, et là au moins, il avait du niveau. Il monta assez rapidement les vitesse pour atteindre un rythme soutenu. Après un bon moment, il passa aux haltères, avec là aussi des poids conséquents. L’idée était double, il s’occupait sur le moment, et se crevait aussi suffisamment pour pouvoir mieux se tenir tranquille pendant le voyage. Il finit par revenir vers Ren en essuyant la transpiration de son visage avec sa serviette.

« J’ai pas gardé mon portable, il est quelle heure ? »

Il allait quand même lui falloir quelques minutes pour prendre une petite douche avant de partir, parce que tous ces efforts l’avaient mis dans un état pas vraiment sortable.

La remarque de Sarang sur le manque de subtilité de son cadet entraîna une réponse un peu surprenante pour lui. Il haussa légèrement un sourcil, et lâcha après un bref instant.

« Je t’aimerais, évidemment. »

À ce niveau-là, Sarang s’avouait vaincu, mais se faisait-il des idées ou est-ce que Ren aimait savoir qu’il avait des sentiments pour lui ? En tout cas il ne faisait rien pour le décourager. C’était pourtant ce que Sarang avait fait bien des fois, lorsque ses compagnons de sexe s’accrochaient un peu trop à lui. Peut-être aimait-il simplement savoir qu’il lui faisait tourner la tête, ça expliquerait son petit sourire victorieux. Un peu étrange, de son point de vue. Ren était indubitablement beau, il était à l’aise en soirée et savait séduire son monde. Est-ce qu’il avait vraiment besoin d’avoir une sorte de tableau de chasse pour flatter son égo, en plus de tout le reste ? Il fallait croire que oui.

Quand l’autre aborda le sujet de ses vols de vêtements, ce fut à son tour d’avoir un petit sourire en coin.

« Pas sûr, pas sûr ~ » chantonna-t-il.

Sans doute aurait-il dû être plus clair, avec quelque chose du genre « Dans tes rêves, mon grand » parce que les vols, c’était loin d’être terminé. Peu importe toutes les stratégies que Ren pourrait tenter pour les circonscrire. Un t-shirt, c’est bien, un t-shirt de Ren, c’est mieux, un t-shirt venant d’être porté par Ren, c’est le nec plus ultra. Sarang n’était pas vraiment capable d’expliquer pourquoi il faisait ça, mais c’était un comportement bien ancré chez lui. Peu importe qu’on le traite d’emmerdeur ou pire à cause de ça.

Une autre chose chez lui qui avait tendance à emmerder les gens, c’était son hyperactivité. Sarang ne s’en rendait pas compte, mais il avait en ce moment le niveau de concentration d’un moustique sous LSD. Qu’il soit conscient ou pas, le choix de faire un peu de sport, même avec un avion à prendre peu de temps après, était la meilleure décision possible. C’était comme si mettre son corps en mouvement permettait de canaliser son esprit. Enfin, il pouvait passer plus de deux minutes sur la même activité, et c’est d’ailleurs ce qu’il fit une fois dans la salle de sport. Sa séances fut vraiment bonne et énergique, c’était à peine s’il remarquait Ren qui tournait en rond non loin de là.

Quand il rejoignit son compagnon, il eut droit à un petit baiser et à un nouveau kidnapping. Sans lui laisser la possibilité d’objecter quoi que ce soit, Ren l’entraîna hors de l’hôtel, dans une voiture qui les attendait. Voilà qu’ils prenaient la route de l’aéroport, et Sarang avait toujours sa serviette sur les épaules. Il prit une bouteille d’eau là où il le lui avait indiqué, et but plusieurs longues gorgées tandis que l’autre lui parlait de faire du sport à deux.

« On aurait pu faire du tapis de course ensemble. Je ferais un bon coach, s’il t’en faut un. » Répondit-il en ignorant volontairement le sous-entendu. Une bien mince vengeance pour la douche qu’on ne lui avait pas accordée. « Tu l’as fait exprès, avoue-le. On n’était pas à cinq minutes près. » Il regarda l’état de ses vêtements « C’est parce que tu voulais me garder tout collé dans mon t-shirt ? Enfin, ton t-shirt… »

Un des avantages d’être riche, il faut bien reconnaître, c’est qu’on ne perd pas de temps. Il y a toujours des employés qui vous précèdent pour s’assurer que vous ayez toujours ce que vous voulez, à l’instant où vous le voulez. Le passage par l’aéroport fut d’une rapidité improbable, Sarang aurait plus poireauté en attendant le bus. Une fois installé sur le siège à côté de Ren, il secoua la tête quand l’autre lui proposa de se changer. Il n’allait pas mettre des vêtements propres dans son état. Ce serait du gâchis. Son amant avoua ensuite qu’il l’avait usé, et il se redressa, l’air légèrement inquiet.

« Oh pardon, j’étais fatiguant ? Faut me dire, hein, quand je vais dans tous les sens. Je m’en rends pas toujours compte. »

Pour se faire pardonner, il enroula ses bras autour de Ren et lui fit tout un tas de bisous sur les joues. Le pauvre ne plaisantait pas, il était réellement en train de s’endormir, et Sarang ne le lâcha pas. Bientôt, la tête de Ren reposait contre son épaule, et après un dernier baiser sur le haut du front, il le laissa tranquille. Il ferma le volet du hublot pour qu’il ne soit pas dérangé par la lumière et finit lui aussi par fermer les yeux sans vraiment s’endormir. Sa séance de sport improvisée l’avait un peu claqué aussi. Le vol fut donc très calme, ce n’est qu’en sentant l’avion faire des manœuvres que Sarang rouvrit les yeux et regarda dehors. Il passa ensuite une bonne minute à regarder le visage calme et endormi de Ren, avec l’impression que son cœur était en train de fondre. Mais pas de façon mignonne et sucrée, plutôt comme si on l’avait jeté au fond du volcan, avec l’anneau unique, Gollum, le bébé et l’eau du bain. Ça faisait mal, parce que ce qu’il ressentait, l’autre ne le ressentait pas et pire encore, il s’en fichait.

« Hey… » Dit-il en glissant une main sous son menton et souriant malgré tout. « Réveille-toi, beauté, on arrive bientôt. »

Pendant tout le trajet, Sarang resta plutôt silencieux. Il grignota des crackers goût pizza qu’il avait piqués dans l’avion peu avant d’en descendre. Et une fois arrivé dans la demeure des Cheon, il passa devant Ren comme s’il rentrait chez lui.

« Minous, minous ? » Fit-il en jetant un coup d’œil dans le couloir, mais il n’y avait pas de minous en vue. Il revint finalement vers Ren. « Promis, je vais être plus calme cette fois. Tu veux encore te reposer ? T’avais l’air d’en avoir besoin. »

Certes, il y avait les glycines, mais elles pouvaient attendre un peu. Ce n’était que des fleurs, après tout.

L’état de Ren était préoccupant, il avait l’air épuisé et éteint. Sarang se savait fatigant, mais tout de même pas à ce point. Ou si ? Non, il devait y avoir autre chose, une chose qui lui échappait. Il alla saluer les chats à l’endroit indiqué, mais ne traîna pas. Peut-être que Ren se sentirait mieux au milieu des glycines qu’il avait tant envie de voir. C’était ce qu’il espérait, et il voulait donc y aller au plus vite. Une douche s’imposait néanmoins, il monta donc assez rapidement dans la suite pour s’occuper de ça. Son amant fila directement jusqu’au piano tandis qu’il prenait la direction de la salle de bain. Quand Ren montra le dressing en demandant s’il comptait encore se servir, il se passa une main dans la nuque.

« Si ça te dérange pas… ? »

Une fois dans la salle de bain, Sarang rassembla les affaires dont il allait avoir besoin et fila sous la douche. L’eau chaude fit du bien à ses muscles qui avaient pas mal travaillé. Il en profita quelques minutes, avant de se laver et de ressortir, une serviette nouée autour de la taille. Il avait entendu quelques notes de musique quand il était dans l’autre pièce, mais maintenant, le silence était total. Ren était toujours assis devant son piano, immobile. Il avait vraiment l’air bizarre. Sarang voulait tirer les choses au clair maintenant. Attendre comme il avait pu le faire en allant à la tour de Séoul s’était révélé un très mauvais plan. Il n’allait par refaire la même erreur, mais devait quand même s’habiller avant.

Il n’eut même pas le temps de choisir ce qu’il allait se mettre que Ren se retrouvait debout devant la porte, avec une question pour lui. Sarang se mordilla la lèvre, c’était une sacrée question, et il avait bien une réponse, mais pas sûr que ce soit ce qu’il ait envie d’entendre.

« J’avais des envies, j’avais des rêves, maintenant je t’aime et le reste est devenu dérisoire. Les choses importantes, je veux les vivre à deux. »

Comme il se sentait suffisamment à nu comme ça, Sarang enfila vite fait le premier t-shirt qui lui tomba sous la main et un pantalon léger. Ça lui permit aussi de faire une brève pause, avant de poursuivre.

« Mon monde tout entier a changé, j’ai changé. » Avant d’ajouter après une brève hésitation. « Toi aussi, t’as changé. »

Ce n’était pas quelque chose que Ren pouvait nier. On était loin, très loin aujourd’hui de ce qu’ils avaient pu être au départ. Son amant, qui avait été si doué pour remettre de la distance entre eux après chacun de leurs échanges sulfureux, faisait maintenant tout le contraire. Il l’avait entraîné dans son monde, dans son appartement même, il le suivait dans ses caprices, l’invitait à son travail, à ses soirées. S’ils étaient devenus quasi inséparables ces derniers temps, ça ne venait pas uniquement de Sarang. Il y avait d’autres choses aussi, parfois de petits détails, mais il en ferait peut-être la liste une autre fois. Quelque chose le préoccupait trop pour l’instant. L’air inquiet, il approcha de Ren et effleura sa joue du pouce.

« T’as pas l’air bien, Ren. Qu’est-ce qu’il se passe ? »

Le Ren qui lançait des sous-entendus coquins semblait avoir disparu. Sarang se demanda s’il fallait mettre ça sur le compte de son instabilité ou s’il y avait autre chose.

« Viens par là. » Dit-il finalement en le prenant par le poignet pour l’amener jusqu’au lit et le laisser s’asseoir. Il attrapa ensuite le tabouret du piano pour s’installer face à lui, prenant aussitôt sa main dans la sienne. « Tu peux me parler, tu le sais j’espère ? »

Le chat qui les avait suivi se mit en boule contre la jambe de Ren, mais Sarang l’ignora. Il scrutait le visage de son amant comme s’il espérait que des explications allaient apparaître sur son front. Il commençait à se sentir mal. Inquiet pour Ren, inquiet aussi d’avoir raté quelque chose d’important. Il ne savait pas quoi faire, car il ne voulait pas non plus forcer Ren à donner des explications s’il n’en avait pas envie. Son cerveau cogitait dans toutes les directions. Il avait besoin de le voir sourire, c’était son besoin vital du moment. Ren n’avait-il pas dit quelque chose de semblable à son égard, peu après l’histoire des cadenas ? Il avait dit beaucoup de choses que Sarang aurait dû comprendre, mais comme d’habitude, il avait été lent, terriblement lent, et obnubilé par ce qu’avait pu dire Ren pour nier tout attachement. Peut-être parce que c’était moins risqué aussi de ne pas s’engager. Restait à savoir si le malaise de Ren avait un rapport avec ça.

« On est dans ta bulle, là. T’as rien à craindre. » Continua-t-il en caressant sa main.

Bulle ou pas, son camarade avait l’air terriblement malheureux. Après un moment, Sarang enroula ses bras autour de lui et le serra avec douceur. Si au moins son corps pouvait lui apporter un semblant de réconfort, il le lui donnait tout entier.